Concours

Lundi 22 janvier 1 22 /01 /Jan 17:57

Mes réflexions sur le Petit Chaperon Rouge s'agitent encore dans mon esprit et m'amènent à La petite fille aux allumettes d'ANDERSEN.

Je n'ai plus les détails du conte en tête, juste mes souvenirs d'enfants et je ne veux surtout pas les modifier, mais fonder mon jugement sur les impressions ressenties, sur ce que j'ai gardé de ce conte.

Je me souviens du froid glacial de la rue en plein hiver, dans la misère et les haillons face au luxe insolent des bourgeois bien gras douillètement emmitouflés, la froidure de la misère, la chaleur rutilante de l'aisance.

La fillette grelottante craque ses allumettes pour se réchauffer alors qu'elle devrait les vendre, mais elle ne résiste pas au froid. La prostituée elle, brûle sa vie plutôt que de travailler...

Chaque bourgeois qui passe lui acheter une allumette avec commisération est le client à qui elle livre une part d'elle même, inexorablement avant de s'éteindre épuisée.

Chaque allumette qu'elle craque pour elle, pour se réchauffer, trouver un peu de chaleur et de rêve, de joie, est un moment privilégié de bonheur, une illusion qui sombre ensuite dans la pénombre glacée de la réalité.

Ses rêves sont magnifiques et éphémères, monde fantasmagorique calqué sur l'inaccessible qu'elle côtoie de si près sans pouvoir le toucher.

A travers chaque client elle prend sa part de rêve pour survivre, dans son caniveau elle devient princesse, les éclaboussures des voitures à cheval ne l'atteignent pas plus que la salissuren'atteint la fille de joie dans les bras d'un homme.

Lorsque l'allumette s'éteint, la pluie et le neige lui transpercent les os, elle a profondément conscience de sa triste condition de fille des rues, à la merci du bon vouloir des gens. Elle se sait condamnée et ne lutte que pour faire briller ses rêves, recommence sans fin le même schéma dont elle ne peut sortir. La seule issue si elle survivait serait toujours la rue, à vendre son corps dès la puberté. 

Elle s'endort engourdie de froid pour mourir, falotte immobile à qui personne ne prête attention, elle ne manquera à personne. Jolie petite chose de passage sur terre, sans grand intérêt pour la marche du monde, même pas capable de ramener de quoi vivre, inutile, même dans la mort.

On peut se demander dans quelle mesure n'est pas pour elle l'évasion, l'échappatoire à ce noir destin annoncé, s'éteindre grisée de rêves radieux et purs plutôt que de subir sans fin.

Le monde tourne sans les faibles, on leur concède une petite place sans vouloir les voir, celle dont personne ne voudrait et personne ne se soucie de leur devenir, rien n'a changé.

Les bonnes gens s'apitoient mais ne feront rien, les parias restent des parias, c'est la nature s'ils meurent, ou Dieu qui l'a voulu...

Les prostituées on passe devant sans s'y attarder, certains les utilisent à l'envie un instant fugace et les oublient, inbutiles comme la petite marchande d'allumettes, elles ne sont là que pour satisfaire leurs besoins.

Nulle nécessité de considérer qu'elles ont une âme et un coeur puisqu'elles ne sont pas du même monde.  Les colonialistes affichaient dans les parcs "Interdit aux chinois et aux chiens", et bien c'est un peu ça, ostracisme, rejet de la différence, crainte de cette différence, rejet de la pauvreté et de son image. Le pauvre est sale, ignorant, voleur et menteur, apparenté à l'animal, pas totalement humain donc ?

Les enfants qui meurent ainsi  dans l'oubli, on les appelle pudiquement "les enfants du Bon Dieu", pour occulter toute velleité de culpabilité si tant est qu'elle puisse se manifester. Le Bon Dieu est bien là pour rappeler à lui les innocents, non ?

Tiens, déduction faite, ces gros bourgeois bien pensants ne seraient alors pas des innocents ? Ah, mais voyons, j'oublie le plus important, les bourgeois prient pour les pauvres et leur font l'aumône pour acheter l'impunité de leur âme... Ils achètent leur innocence au prix de celle de ceux pour lesquels ils prient, ces âmes perdues sont donc rachetées auprès du créateur et elles peuvent s'envoler en paix sans distraire la serennité des bien pensants, petits anges déchus purifiés, c'est tout juste s'ils ne devraient pas remercier pour tant d'honneur.

Et puis, l'innocence attribuée à ces pauvres petites âmes est bien apparentée à la simplicité de l'idiot, c'est si pratique de considérer qu'après tout, elles étaient et seraient devenues bien peu de choses.

Les miséreux sont donc au moins utiles à une chose, à déculpabliser les puissants, à les conforter dans l'idée que la richesse leur est dûe puisqu'eux seuls savent l'utiliser à bon escient tout en dispensant gracieusement  les miettes aux petites gens qui eux, franchement ne sauraient qu'en faire, si ce n'est de brûler et dilapider leur avoir à tort et à travers, c'est bien connu.

Ils peuvent continuer de mourir tranquillement, avec toute la compassion populaire, que ce soit en Afrique, en Europe, en Asie ou ailleurs avec la bénédiction tacite de toute la communauté.

Zibelyne le 16 01 2007

 

Par zibelyne - Publié dans : réflexions
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